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La pluie s' était arrêtée sur le bord du chemin. Extraits de Vagues d'Oxalis Texte intégral de vagues d'Oxalis Pourquoi ne voulons nous pas de cette Europe là?
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Il était pourtant bien dans son refuge. C'était confortable, sécurisant,
bien isolé de l'extérieur dur et froid. Murs de briques étanches, volets
toujours clos , comme ses yeux, sur cette réalité qu'il refusait de
voir.
Alors pourquoi l'avoir quitté, un jour où l'appel de la rue se fit assez
bruyant pour percer ses murailles? Pourquoi s'être brutalement plongé
dans l'eau glaciale, avoir
affronté d'un coup tout ce qu'il avait soigneusement éloigné de sa
conscience?
Longue réflexion? Cheminement lent? Sursaut salvateur empêchant
l'engourdissement fatal?
Il fut d'abord aveuglé par la lumière crue, nouvel éclairage sur la vie,
contraste avec la pénombre réconfortante de son abri. Il se sentit
agressé par tout ce qu'il découvrait , comprenait enfin.
Seul, désarmé, sans défense, comment se protéger? Comment se
reconstituer une enveloppe-carapace,
pour pouvoir souffler de temps en temps, se retrouver , lâcher prise ?
Des
mois de recherches, de replis momentanés, lorsque la pluie tombait
trop drue, trop froide, la grêle trop douloureuse, l' orage trop
violent.
Des mois d'appels désespérés, impatients, de quête éperdue de contacts,
de liens, d'amitié.
Des mois où parfois , perçait la nostalgie du confort de son ancienne
retraite.
Oui mais voilà, pris dans
la tourmente, il en avait perdu la clé !
Le vent de la tempête lui avait donné le goût de la liberté, du
grand air . Le chaleureux confinement était devenu
claustration, le cocon , prison. Il ne pouvait plus reculer,
sursaut définitif, aucun espoir de régression.
Le moment n'était plus aux questions, une seule solution : foncer, se
lancer, s'imposer s'il le fallait, se trouver une place, se faire
accepter. Reconstruire un cocon, immatériel, amical , fait de liens
tissés: chaîne de convivialité sur une trame de travail.
Cela
prit du temps, le temps des relations, des discussions, le temps de
la connaissance, de la confiance, le temps de tricoter
un grand manteau bien chaud, un refuge d' affection
et de mots, pour
pouvoir affronter le froid de l'extérieur sans trop de
douleur.
28 janvier 2004
La pluie s' était arrêtée
sur le bord du chemin.
Elle voyageait depuis longtemps prisonnière des nuages, lorsqu'elle vit ce village et ses habitants, un peu plus lucides, un peu plus généreux que les autres. A chaque route d'accès au village, ce panneau, symbolique, avait été apposé: « Zone hors AGCS ». Consciente de son inestimable valeur, libre et attachée à sa liberté, elle voulu faire confiance à ce signe et décida alors de séjourner ici. Partout ailleurs , c'était la canicule, tout alentour était sec, plantes et vieillards mourraient. Le village devint rapidement une miraculeuse oasis de verdure qui attira de loin. Le Maire réunit le conseil. Que faire de cette manne liquide? Certains proposèrent de la vendre à prix d'or, en bouteille ou dans des tuyaux aux villages voisins, de faire payer l'accès au lac qu'elle avait formé et dans lequel, se regardant dans cette étendue calme d'elle même, elle se trouvait belle. Ce jour là, elle se fit orage pour signifier sa colère. A la séance suivante, fut abordé le problème de la surabondance qui menaçait d'inondation. D'autres conseillers parlèrent de bétonner, canaliser, endiguer. Ces grands travaux créeraient des emplois, soutiendraient la croissance. Ce soir là, elle se fit grêle violente , destructrice, pour leur rappeler qu'elle était plus forte que n'importe quelle construction humaine. Le troisième jour, un conseiller, resté jusqu'ici écoute et silence, prit la parole. Il parla au nom de la pluie, comme s'il l'avait intimement comprise. Il leur dit qu'elle n'appartenait à personne, ou à tous, qu'elle devait rester libre, qu'on devait la respecter, adapter nos constructions à son abondance en laissant la terre la boire, la drainer jusqu'aux réserves secrètes et profondes, la laisser voyager vers les cours de son choix, vers le partage, vers les autres villages. Elle se fit alors amie, régula ses humeurs, devint l' alliée du paysan, du vigneron, de tous les citoyens qui avaient su la respecter lorsque, captive des nuages, elle s'était cherché un abri, une terre d'accueil, un endroit où pleuvoir...
27 mai 2004,
petit conte militant pour :
Lucille, Gwénaël, Coline, Valentin, Léonie,
la commission eau, la commission AGCS,
Claire Elle. Elle, ni sombre, ni claire, simplement « elle », générique. N'importe laquelle de la multitude de cette moitié de l'humanité. Quelques exceptions. Quelques unes, plus libres, plus éduquées, plus fortes, vivent leurs sentiments, osent le refus. Mais, même dans nos pays libres, des contraintes, sociales, religieuses, psychologiques, souvent auto-imposées s'appliquent. Elles... Alors... elles donnent, elles se donnent. Elles donnent tout. Leur temps d'abord. Tout ce temps dû à la famille, à l'homme. Toutes ces tâches, ingrates, répétitives, voire dégradantes, dévalorisantes. Leur liberté ensuite, contrat signé, l'engagement plus fort pour elles que pour eux, la faute plus grave pour elles, la punition aussi, pouvant aller jusqu'à la mort, pour elles, rarement pour eux. Leur corps enfin. Un viol n'est pas forcément unique, rapide et violent. Il peut être légitime, fréquent et consenti à chaque étape, dans la peur, dans la honte. Je parle d'elles. Collées à la terre, elles sont. Cette terre sur laquelle elles se couchent pour enfanter. Cette terre vers laquelle elles se penchent pour travailler. Cette terre à laquelle on les plaque pour les violer. Je parle d'elles, la moitié de l'humanité, moins quelques exceptions.
Claire, 25 avril 2004
Rêve pas, t 'as pas pied ! Quitte à mourir et à finir mâché dans cette usine, j'aurais aimé que quelqu'un se serve de mes feuilles pour CRIER Crier sa révolte, contre la guerre , règlement archaïque des conflits, digne de l'âge pré-langagier . Crier sa volonté d' une paix équitable, respectueuse des cultures, des religions, des enracinements millénaires Crier son ras le bol contre le travail-torture, l'exploitation de l' Humain au profit des marchés financiers Crier son envie d' un travail-épanouissement, créatif, formateur, expression de la personnalité de chacun, librement choisi, utile à soi et à tous Crier contre la violence faite aux faibles, aux femmes, leur soumission, leur exploitation, leur exposition comme viande du boucher Crier comme un appel au respect mutuel, à la compréhension, au partage harmonieux des idées et des actes Hurler la folie des humains, mes frères noyés, la nature saccagée, bouleversée jusque dans ses équilibres intimes, poussée à la révolte climatique Hurler l'urgence de prendre conscience, les processus irréversibles engagés, l'imminence de la catastrophe ,à l'échelle d'une vie humaine ! à défaut d'engagement vers une nécessaire décroissance J'aurai apprécié aussi , que quelqu'un de plus doux, plus désespéré peut être, se serve de moi pour chanter Chanter plus de convivialité, la chaleur de l 'amitié, le besoin d'amour et de sensibilité Chanter pour le respect des différences, l'authenticité des valeurs humaines retrouvées . Chanter la poésie du monde, pour qui sait le regarder, l'espoir irraisonné pour qui ose rêver Chanter des chants de lutte qui soutiennent les pas des marcheurs, sur le pavé Chanter, quand à force, on n'a plus celle de crier Je me suis rêvé tract, affiche, partition, manuscrit de rêveur ou de révolté, consolation à mon involontaire sacrifice Mais voilà, je suis devenu publicité, au service des marchands de superflus, de produits à bas prix de l'exploitation humaine Inutile, nuisible même, encourageant à privilégier l'argent, pour pouvoir consommer toujours plus d'objets de bonheur illusoire Incitation à l'individualisme, à la peur de se faire voler le bien si durement acquis, au repli sur soi, sur ses intérêts premiers Et je finirai, sans être lu, dans l'incinérateur tout proche de cette usine de pâte à papier où je fus en feuille mué. 8 janvier 2004
Au bord d' un champs, près du ruisseau, rassemblés autour d'une immense
flambée, ils sont tous là, les yeux brillants d'une étrange fièvre. Ce
soir, tout ce qu'ils
rejettent de la société
s' embrase devant eux.
Les flammes projettent leurs ombres sur les toiles des tentes réparties
alentour, fantômes de géants vacillants, qui paraissent hésitant.
Pourtant, leur détermination est forte, une sorte de rage les anime. On
le comprend de ceux qui n'ont rien à perdre, mal-payés, mal-insérés,
mal-logés, mal-aimés, mais certains regardent leurs pauvres acquis
partir en fumée avec la même tranquillité, soulagés par la cohérence
retrouvée.
Les premières étoiles apparaissent, la nuit sera belle et sèche, peut on
y voir un bon présage? Qu'une poignée de fous, animés par la rage,
toujours au front pour lutter contre les attaques libérales immole
son confort un soir de désespoir, c'est une chose. Mais, c'est sur toute
la planète, qu' à la tombée de la nuit , les feux
se multiplient. Vue d'un des nombreux satellite d'observation, la
Terre doit ressembler à un ciel semé d'étoiles. Prévus au départ comme
actes symboliques, réponse à la dernière loi
humanicide de l'organisation mondiale du commerce, les feux ont été
utilisés par les militants les plus radicaux comme geste de rébellion.
Certains ont commencé à nourrir les flammes avec leurs contrats de
travail aliénants, les factures des objets superflus, les contrats de
fourniture d'énergies polluantes, les cartes d'identités ne servant qu'à
refouler les indésirables par charters meurtriers, les décomptes des
crédits qui les enchaînent au système...
Folie contagieuse se répandant de foyer en foyer, prise de conscience
simultanée , les rancoeurs qui couvaient
depuis trop longtemps sous la braise trouvent enfin un moyen
d'expression. Les millions de résistants à la mondialisation créent
leurs étoiles d'un coeur léger.
Voyant
de loin ces lueurs d'espoir
, les voisins , intrigués, alertés,
croient à une fête, pourquoi les détromper? Ils s'approchent, se renseignent, s'interrogent, puis ,
selon la prégnance du système en eux , adhèrent ou fuient.
La nuit avance, les manifestants s'organisent, couchent les enfants dans
des tentes, partagent la nourriture, les pulls et les couvertures. De
petits groupes se mettent à chanter, danser ou lire des poèmes, d'autres
discutent, tous découvrent le bonheur d'être ensemble, la chaleur de
l'amitié, la force de la collectivité.
Les flammes diminuent, ils refusent de brûler du bois sans raison.
Maintenant , ce sera ressource nécessaire, alors autant ne pas
l'utiliser pour le plaisir si la température est assez douce.
De groupe en groupe, se transmet l' euphorie, tout le monde fête
la
rupture, la reconquête du destin. Esclaves de la domination
économique heureux de s'être affranchis, tous savourent l' instant, sans
angoisse de l' avenir. L' exaltation grandissant, il devient très
difficile, pour les organisateurs de modérer les envies de vengeance, de
représailles qui viennent à certains. Discussions, raisonnements ,
contraintes, n' empêchent pas une poignée de minoritaires en colère
d' aller réveiller les chefs d' entreprise, les banquiers et leurs
complices politiques, et même, parfois , d' incendier leurs usines,
magasins ou maisons.
Il est tard,la fatigue
ayant raison de tous, les plus hargneux sont enfin de retour, près du
brasier ou une faible lueur persiste. Tous vont se coucher. Ne restent
que d'incurables rêveurs, qui contemplent l' ultime rougeoiement de
cette nuit unique, et s' interrogent en silence, en pensant à demain...
Demain, lorsque tous les feux seront éteints et qu' il faudra tout
rebâtir, reconstruire, recréer une société ,faire naître une utopie des
cendres d'un feu de joie.
14 janvier 2004
Mais quelle rage les anime encore , alors que la conscience de la
plupart des hommes s'endort ?
Quelle flamme persiste à brûler dans leurs yeux , quand souffle un vent
de fatalisme ?
Où trouvent ils la force de battre ainsi le pavé interminablement, quand
tout paraît joué d'avance ? Pourquoi
lutter sans répit contre le feu nourri des attaques libérales,
l'ennemi est si fort ?
Épuisés, nulle fatigue ne les atteint plus, aucun virus ne résiste à
leur fièvre.
Certains , dans leur désir de fuir cette vie où l'humain n'a plus de
place, se jettent à corps perdu
dans l'action, et y consument jusqu'au bout
leurs forces vitales. D'autres y brûlent leur révolte , afin de
résister à la tentation de la violence.
Mais tous, face à l'inertie de leurs contemporains,
se veulent étincelles, expliquant patiemment à chaque passant les
pièges qu'on nous prépare.
Ils espèrent mettre le feu aux poudres avant qu'il ne soit trop tard,
refusant d'attendre bras croisés, un hypothétique grand soir.
Ils rêvent d'enflammer les consciences, de redonner dignité à leurs frères et chaleur à la société.
Sous les braises encore rouges des anciennes luttes
perdues, couvent leurs
cris
de refus.
Ils veulent croire, contre tout espoir, qu'un jour une légère brise ou ,
s'il le faut vraiment , un ouragan,
attisera le feu qui faiblit .
Voilà pourquoi ils ont tant à coeur
de ne jamais le laisser
mourir .
15 janvier 2004
L'hiver 86 a un temps fermé les salles de classe. La formation des
citoyens emprunte d'autre
voies, plus concrètes, plus directes. Les cours d'économie ont quitté
les livres, pour une mise en actes. Le prof explique, motive. Dans sa
classe de 1ère B vont naître des vocations militantes.
Débrayage du lycée de Meaux, pour lequel les enfants de bourgeois
obtiennent des dérogations, afin de fuir celui-ci, trop populaire, ayant
cour commune avec le LEP, et mauvaise réputation. On prend le train, et
le temps de discuter; on marche jusqu'au lycée, on fait connaissance,
d'autres valeurs, d'autres qualités émergent; on demande à rencontrer
les profs grévistes, on se frotte aux adultes, à l'autorité; on essaie
de convaincre une délégation d'élèves, on apprend à argumenter.
Manif monstre à Paris. « Devaquet au piquet! »
Cordon de sécurité, notre rôle est de protéger, mais aussi de
circonscrire nos camarades. Peut être également de sauvegarder les
vitrines bourgeoises des excès de la révolte, on ne sait pas, cela ne
nous a pas été officiellement signifié, mais sûrement, à la réflexion.
La manif est énorme, des milliers d'étudiants, de lycéens, ceints par ce
solide cordon de jeunes plus engagés, qui se tiennent par la main, liés
par leur mission.
Par ces mains qui se joignent passent aussi leurs émotions
d'adolescents, de jeunes adultes de 17 ans, qui ont choisi leur voisin,
leur voisine de lutte, un peu moins innocemment qu'on pourrait le
croire.
Rue d'Assas, fac du même nom, le GUD est là, en face, organisé,
menaçant.
Affrontements inévitables entre jeunes sûrs de leurs convictions toutes
fraîches. Injures, menaces, jets d'objets, quelques bleus, quelques
bosses, mais le seul mort, Malik, c'est dans un commissariat qu'il
décédera!
Affolement dans les rangs, le cordon se disloque, panique, fuite en
toutes direction, la rue se vide en un instant. Tétanisée, paralysée par
sa peur, elle n'a pas bougé. Elle est là, au milieu de la rue, ne voyant
même plus la menace. Il revient alors la chercher, l'attrape par le bras
et l'entraîne à l'abri d'une porte cochère...
à Rémi B.
3 avril 2004
posté le 8 juin 2005 à 21h02
Histoire de rages et de vagues. Histoire lente comme les pensées.
Aucune porte, aucune fenêtre pour retenir les pensées. Pas de papier pour le journaliste otage, son cri s’envole dans la nuit, et perdu comme un nuage, mais inapte à la pluie, ne retombera sur personne. Pensées volatiles à tout jamais dispersées, accepter leur mort comme l’autre. Accepter qu’elles ne survivent pas à l’instant. Les mots sont traces, danger, falsifiables, interprétables. Le mot témoin devient traître et cause la chute, alors qu’il devait être avocat de la sincérité. Mots autonomes, affranchis, mercenaires. La note mélancolique égrenée sur ton clavier sera t’ elle plus fidèle, car plus énigmatique ? Article 166, détournement mineur ou contresens, peut on plus facilement se fier aux mots pragmatiques ? Un mot en appelle un autre, par proximité, résonance, il fait naître une idée. Ce sont eux les maîtres des pensées, leur fil directeur, leur genèse. La poésie gouvernant nos idées. De quel cerveau lyrique est sorti le libéralisme ? L’histoire européenne est lente. Étouffés par TF1, ce qui reste des citoyens, coincés par la peur, se meut avec lenteur, marche funèbre sur le macadam. Sarko enverra ses soldats et chacun rentrera chez soi. Fatigue européenne, fatigue des nantis sans attente, ventre trop lourd, tripes trop lentes à s’émouvoir. Crier « reconquête !! », envahir les médias menteurs !! Pensées volatiles, muscles indociles. Attendre. Attendre que le monde se fasse plus tendre. Encore une fois le mot est ma loi, et je lui reste soumise. L’ immeuble à tous vents, pensées versatiles, inutiles. Attendre... et obéir à ce que d’autres penseront, et laisser grincer le violon. Les auditeurs crieront « ouf ! » lorsqu’il se taira et écouteront enfin le miel de nos mots de reconquête, de dignité, d’espoir. Lentement. Révolution lente au pays des nantis, chez les pilleurs de la planète. Peur de perdre ce que l’on a, plus forte que l’espoir de grappiller du mieux, pour nous, pour les autres. La seule légitimité de notre lutte : se battre pour les autres, exclus, pays pillés, se battre contre nos intérêts immédiats, marquer des buts contre le camps auquel, sans notre consentement , nous appartenons. Laisser mourir les idées fourmis dans la symphonie. Je reste forte de mes convictions, personne ne pourra les arracher. Vertige planétaire, la Terre tourne plus vite que le temps de l’histoire. Je tente une promenade dans la rizière de la révolution : ce n’est que batailles d’idées et d’ambitions, enjeux historiques et de pouvoirs, perversion du mouvement populaire auquel ils font dire ce qu’ils veulent. Les accusations battent mes tempes, rester sure de soi est la seule solution, intime conviction. Revenir au mélodique avant de sortir... pour ne pas partir en note de pluie sur le toit de tôle. Redevenir mélodiquement structurée, logique. Laisser les images de plages passions et de rizières révolutionnaires endiguées. Crier la pluie de mots rocailleux des batailles à venir. Le jeune loup crie time is monay, mais le temps du siècle est la mesure de la révolution. Pourquoi s’ imposent ils à moi, martinets criailleurs dans le ciel du soir ? Mais posez-vous à la fin !! Ils tournent, absorbent mes pensées, toile de fond sonore, qui capte mon attention, mon énergie. Je sais. Ils ont peur de mourir, peur que je les oublie, peur qu’ une idée chassant l’ autre, j’ oublie de les dire, la prochaine fois. Et alors ? Qu’ importe ? Pourquoi vouloir que tout soit dit ? D’ une histoire à l’autre, questions à bâillonner, comme ses peuples floués dont on veut masquer le non. Les puissants trop puissants, tentent d’insuffler le découragement. Attendre que sourde la rage d’ un peuple exaspéré de n’être jamais écouté, attendre, mais du même temps : dire, dire, toujours, dénoncer... Mélancolie militante...
extraits de: histoire(s) lente(s), mai-juin 2005
Un funambule, sur le fil de sa vie, tente de maintenir l'équilibre, mais le vertige de la planète l'assaille. Il est à terre pour une fois. Instant repos dans la chaleur de l'été, à l'ombre dense et accueillante des robiniers au feuillage délicat. De temps en temps, il lève les yeux de son livre, son regard adouci par les mots tendrement empathiques de Sépulveda. L'abri a été rasé, enlevant au jardin son air désuet d'ancienne cour d'école, mais les murs restent, protecteurs. L'un d'eux, surmonté d'un grillage, sert de perchoir à une tourterelle. Mais le funambule ne voit que le barbelé, sinistre symbole avec ses pointes acérées, et ses pensées volent, rejoignent tous les privés de liberté.
Ça ne change rien, lui chante le vent, l'invitant à l'insouciance en faisant onduler l'herbe comme verte marée. Ça ne change rien? Otage mon frère emmuré, donne nous ton avis, de quoi furent faites tes pensées aux temps captifs? L'otage lointain promène son regard perdu sur la clôture qui le retient, ses yeux ne voient que l'oiseau, le grillage est trop intégré à son quotidien pour ses pensées voyageuses. Capacité à être ailleurs, aide l'otage à se libérer, mais oxyde l'été du funambule. Compétence ici inutile, devient nécessité quand la vie marche à revers.
Le journaliste, éternel otage, dont le métier était impérieuse nécessité de l'âme, se voit réduit, pour sa survie, à faire l'interview de son geôlier. Est ce trop? Est ce mal? Le geôlier tient il compte du regard de son prisonnier? Se dit-il lorsqu'il le maltraite, qu'un jour, libéré, il pourra raconter? Ou est-il si sur de son exécution prochaine qu'il agit comme s'il était déjà mort?
Le journaliste va mourir de ses mots gravés sur les murs de sa cellule, il écrit, depuis des jours, des nuits. Il écrit, il témoigne, c'est sa vie, sa raison d'être. Libérez-le... ou taisez vous, qu'il n'ait plus rien à écrire. Non... implore l'otage exsangue, laissez moi, cela m'apaise: je rêve d' un funambule sur un fil, lui cauchemarde d'un otage emmuré et me fait vivre. Mon rêve le construit, le sien me libère.
Ce soir le funambule apprend sa leçon. Il est humain, et rien de ce qui fait la vie des humains ne sera cause de sa chute. Angoisse n'est que répétition, apprentissage, préparation au pire à venir. Il élargit sa pensée, l'otage quitte sa cage, le funambule tient par ses liens à tous les autres humains. Par cette humanité, partagée dans l'épreuve, il se sent prêt, à défaut d'être fort, ce qu'il ne sera jamais. Non, je ne vous utilise pas! crie le funambule, malgré la stupeur des spectateurs. Image commode? Métaphore oiseuse? Non! je vous incarne! Témoins malgré vous de l'intérieur du décor. Yeux du monde au cadrage serré. Voix rebondissant sur les parois des prisons, alors que vos collègues dénigrent et raillent les timides efforts de liberté des citoyens qui s'éveillent, des militants qui se battent pour toutes les libertés, la votre présente, la leur... future. À moins qu'ils ne soient déjà planqués du bon coté, celui qui est le mieux payé, valets du frics et du pouvoir se sentant plus forts que les militants révoltés. Protégés... jusqu'au moment où un dictateur dira que le nom seul de leur profession est déjà une subversion.
La corde du funambule vibre sous les cris, il tremble mais son corps absorbe les pleurs de la planète, il tient l'équilibre et sourit. Conscient de la douleur du monde, il marche ce soir sur la liane tendue en chantant. Puis il descend et écrit, en mots de vent, les larmes et les aigreurs qui ont fait trembler le fil de sa journée.
Les yeux perdus de l'otage se posent sur la clôture qui le retient prisonnier. Sur le cruel barbelé, il voit l' oiseau et murmure, le voyant s'envoler: vas mon funambule... et vis... vis et lutte pour la liberté avant que le hasard ne t'enferme...
mots libérés et adaptés de « vagues d'oxalis »
D'une corde à l'autre... celle-ci vole au vent, j'y accroche mes idées fixes, et les enveloppes qui nous protègent et nous disent s'y détachent sur le bleu du ciel. Il marche. Non! Il est fou! Au secours! Auguste appelle, affolé, venez voir!! Funambule s'applique, pas après pas, il avance sur les barbelés, il veut attraper la sorcière, c'est elle qui l'a entraîné là. -Je fais ce que je veux! Mon corps m'appartient! -Non! C'est aussi ton outil de travail, si tu blesses tes pieds tu ne pourras plus payer ta part!! Descends!! Il avance, les pointes entaillent ses pieds comme crocs de chiens méchants pénètrent la chair. Sous le fil, il pleut, son sang. La sorcière est là, devant lui, perche brandie, elle marche à reculons, l'enjoint à continuer, tout en attendant sa chute. Au bout de la douleur, il dérape et tombe, c'est le moment que choisit la sorcière pour abaisser son bras, qui menace depuis tant d'année, et l'endormir à coups de perche.
Il est encore par terre, dans la sciure ensanglantée -ben oui, c'est de la sciure par terre, pas du sable, le sable c'est pour la plage, le paradis- la vie est labeur, sciure et sueur. La petite voix est là, penchée sur lui, elle éponge son front. -Arrête, tu travailles trop! Qu'as tu besoin de t'entraîner la nuit? Regarde, tes pieds sont tout blessés, et tu vas te casser quelque chose, un jour, à force de tomber... Funambule se tait. Taire la douleur, taire la peur. Cette fois, il y était presque, il a bien cru attraper la sorcière pour lui tordre le cou, mais au dernier moment, c'est elle qui l'a battu. La prochaine fois, il sera plus fort, plus endurant. Il a peur...
Il a peur... que Toi aussi tu aies peur, de ses mots, de ses images...
Ces mots saisis l'ont lessivé, il craint d'encercler ses journées de cordes à linge barbelées. Puis il a honte, car si lui souffre dans sa tête, d'autres connaissent le concret de la souffrance. Taire la douleur et sa peur, et marcher, avancer... ne rien dire surtout, sinon Auguste ne voudra plus qu'il monte et l'obligera à faire le clown, loin de l'intense de ses vertiges. Ne rien dire... qu'à Toi...
Certains mots, parfois, on n'aime pas les relire. Les poser soulage, déleste, mais il faudrait pouvoir les enfermer dans un grimoire, dans la plus haute tour d'un château perdu au plus sombre d'une inextricable forêt. Oui, mais depuis mon rêve, Tu es le prince lecteur qui défend l'accès à la tour, tu as accès au grimoire, tu le protèges des souris voraces et tu me protèges des francs-tireurs embusqués, c'est la règle du jeu: laissez vivre toutes les vagues, ne me reste que le choix des mots pour les décrire.
[...]
Alors funambule erre et titube, à même la terre ferme. La marée basse lui dévoile l'horreur d'une plage meurtrie. Des trous dans le sable froid se sont accrochés à ses pensées, comme sa corde à linge devenue barbelé biquotidien. Fragile funambule perd l'équilibre sur le bitume lisse d'obstacle, vertige sans hauteur, ses pensées captives, ailleurs. Captives des mots des autres et de leur trop dure réalité. Et ce fragile funambule lui, n'a même pas de raison, pas de raison connue à sa fragilité.
-Oh, merci, c'est gentil de me rendre visite, mais tu aurais du me prévenir, j'aurais balayé les toiles d'araignées du plafond, j'aurais chassé la sorcière. Comment? Tu ne la voit pas? Ah bon, tant mieux alors. Tes mots m' ont rejoint dans ma fragilité, mais moi, de quel témoignage, de quel passé ma fragilité est elle dépositaire? Je n'aime pas le froid non plus, il m'arrive en marchant l'hiver, de penser que c'est la plus simple des tortures d'atteindre l'homme dans ses besoins élémentaires, de nourriture, de chaleur, de dignité. Alors je marche avec le froid, la culpabilité de m'en plaindre, et la peur de ne pouvoir le supporter, au besoin. Ça fait beaucoup à gérer d'un coup! Comment savoir de quelles images, de quelles fidélités nous sommes porteur? Sur combien de générations l'exil marque t'il son sceau? Dites moi, bruns vosgiens... Dites moi d'où me viennent ces images de barbelés, de crocs de chiens-policiers, de neige et de sang? Peut être fragilité est elle fuite, refuge? Soulagement de se dire que dans la pire des situations on n'aurait pas à endurer trop longtemps, on partirait avec les premiers, avant d'avoir le temps de trahir sa dignité ou ses frères. Peut être n'est ce pas moi qui suis fragile, mais mon fil? Me faut il pour autant y marcher prudemment, à petits pas? J'ai l'habitude de marcher jusqu'à épuisement, mais parfois la fatigue vient tôt, et trop souvent, sur le chemin, et je me décourage d'être si faible, quand j'aimerais tant être utile. Merci de ta visite, amie, peut être les mots sont ils fait pour ça: pour renvoyer chacun sur son propre chemin, tout en l'ouvrant aux autres, à l'humanité: fourmi dans la fourmilière.
(extraits de « vagues d'oxalis »)
refrain: entre jeunes loups et les lois du marché y-a-t-il une petite place pour nous? Tant qu'on refoulera des agences pour l'emploi poètes, doux, rêveurs faut pas vous étonner d'nous voir marcher ailleurs et garder jalousement la liberté de nos pas.
1.Quoi que fasse la vie qu'elle nous broye, qu'elle nous plie vous ne nous changerez pas. En nous des invariants que l'on perd, s'adaptant mais qu'on fini par retrouver
refrain
2.vous dites « qu'ils sont lents! » quand c'est le temps du vent le temps de la fleur sur l'eau le temps pour les pensées, d'faire le tour de la terre et revenir chargées de sel et d'humanité
refrain
3.Vous dites « qu'ils sont bêtes! seront proies dans la jungle et l'auront bien cherché » quand nous ne cherchons en nous, et dans le monde que paix entre frères et terre
refrain
4.vous sortez le moule unique et nous brisez les membres pour de force nous y caser. Certains se taisent, étouffent, d'autres hurlent, se rebellent, portent leur drapeau comme unique CV.
Refrain Pour G.I-L. 6 décembre 2006
Pourquoi ne voulons nous pas de cette Europe là?
Pourquoi rejetons-nous le traité de Lisbonne après avoir refusé le traité constitutionnel? Sommes nous de dangereux bellicistes qui refusent l'unité européenne et se replient sur leurs petites régions, leurs logiques de cantons et leurs querelles de clochers? Ne voulons nous pas par l'unité faire reculer le risque de guerre au sein de l'Europe? Aurions nous oublié les deux précédentes guerres mondiales et leurs désastres? Non bien sur, nous ne sommes ni inconscients ni criminels, nous voulons pour nos enfants une Europe et plus largement une Terre en paix, et des conditions de vie décentes où qu'ils naissent. Mais l'Europe du TCE et du traité de Lisbonne, puisqu'il s'agit bien du même texte dans un emballage différent, ne prépare pas à cela. En exacerbant la guerre économique, par la libre circulation des capitaux, la délocalisation des outils de production dans des zones de moins bonne protection sociale, et la venue d'ouvriers qui travaillent aux conditions de leurs pays d'origine, c'est la guerre sociale entre travailleurs qui s'installe. De plus, une Europe inféodée à l'OTAN perd son indépendance et devient soumises aux décisions des USA. L'Europe devra s'engager dans leur conflits, même aux dépends de sa sécurité. Pour finir, une Europe où la parole des peuples lorsqu'ils sont consultés est ensuite bafouée n'aura jamais aucune légitimité démocratique pour imposer ses décisions, ce sont là les dirigeants eux même qui déclarent la guerre aux peuples qui de trahison en trahison se sentiront de plus en plus autorisés à l'insurrection, c'est la guerre civile qui se prépare. Quand les travailleurs détruits par la crise, les citoyens trahis par les parlements n'auront plus rien à perdre...
11 avril 2009
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